Catastrophe! Montréal va déverser 8 milliards de litres d'eau usée dans le fleuve St-Laurent. Quels seront les effets à long terme? Pourquoi salir notre beau fleuve? Comment peut-on hésiter à construire une dérivation qui va seulement coûter 1 milliard de dollars pour éviter cela?
Et si, avant de se rouler par terre, on vérifiait les faits?
Le débit annuel moyen du St-Laurent, à la hauteur de Québec, est de 120 millions de litres d'eau... à la seconde. En 10 secondes il passe 1 milliard deux cent millions de litres. En 1 minute et 5 secondes il passe 8 milliard de litres.
1 minute 5 secondes.
Vous en parlez depuis 2 semaines.
Vous manifestez pendant des heures.
Pour gagner 1 milliard de dollars il faut travailler plein temps, au salaire minimum sans payer d'impôt et sans prélèvement à la source, pendant 333 333 ans soit 33 fois plus longtemps que l'histoire écrite de l'humanité.
Donc, faut-il vraiment consacrer 33 fois la durée de l'histoire de l'humanité pour 65 secondes d'écoulement d'eau?
Et si on revenait à de vraies préoccupations? Et je ne parle pas du niqab qui est un sujet tout aussi ridicule et futile que celui du méga déversement qui n'a rien de méga.
Bernard Demers, expert en gouvernance (éducation et santé)
Blogue de situations de gouvernance (y compris politiques) et d'anecdotes en international
dimanche 11 octobre 2015
lundi 13 juillet 2015
Je reviendrai à Montréal
Depuis que Charlebois a écrit
cette chanson, je l’ai toujours en tête au moment du retour. Quel que soit
l’avion, quel que soit le point de départ, le point d’arrivée est finalement
Montréal, où je reviens. Et j’ai le sentiment de retrouver quelque chose
d’infiniment important, sans pouvoir le dire autrement qu’au travers les
aurores boréales, la clarté des ciels d’hiver ou le bruit de la rivière qui
traverse mes terres.
J’ai connu des retours mémorables,
après des évènements tragiques. J’ai connu davantage de retours rapides et
paisibles. Mais, quel qu’en soit la nature et les circonstances, ils m’ont tous
ému. Je me souviens encore d’un de ces vols de retour d’Haïti, dans les mois
qui ont suivis le tremblement de terre, où le pilote nous a signalé que nous
venions d’arriver en ciel canadien et nous a souhaité à tous un bon retour à la
maison. Je me souviens de ce retour du Laos, après plus de trente-six heures de
vol et de correspondance, où on m’a fait attendre pour le dernier vol, celui
entre Toronto et Montréal, alors que je n’en pouvais plus de fatigue et de
décalage horaire. Je me souviens de ce vol de rapatriement dans un Hercule de
l’armée canadienne avec le pilote qui nous dit, après l’atterrissage, « Merci
d’avoir volé avec les Forces armées du Canada» montrant par là qu’il y a des
militaires pinces sans rire.
Mais je suis devenu
superstitieux, ou réaliste. Tant que le retour n’est pas complété, tant que mes
deux pieds ne sont pas dans l’aérogare de Montréal, je n’en parle pas. Ainsi
j’écris ce texte au Congo, à Brazzaville. Mais je ne l’enverrai pas, je ne le
finirai pas, pas tant que je n’aurai pas regagné Montréal, puis Béthanie, tant
que je n’aurai pas retrouvé mes traces et mes repères. Bref, tant que je
n’aurai pas la certitude d’être revenu.
Je vais prendre des vacances, y
compris de l’écriture de ces courts papiers que j’envoie à la Voix de l’Est
depuis un an. Je recommencerai probablement à l’automne, si la rédaction veut
bien encore de moi, et sur un tout autre sujet. Ceci étant, ce qui est plus
certain encore, c’est qu’une fois mes pieds ancrés sur le sol de ma terre, une
fois que mes mains auront touché mes arbres et tâté les murs de ma maison, je
commencerai à me préparer à partir, encore et ailleurs. Ne serait-ce que pour
connaître à nouveau la joie du retour.
Mais là, tout de suite, je suis revenu à Montréal.
mardi 30 juin 2015
Les rapports
C’est la fin du mois, alors il
faut écrire un rapport, le rapport mensuel. Mais c’est aussi la fin du
trimestre, lequel commande un rapport, le rapport trimestriel. Et puis je
quitte bientôt, mon mandat achève, ce qui nécessite un rapport, le rapport
final. Par ailleurs il y a eu deux activités et trois extrants de produits ce
trimestre et cela demande des rapports, les rapports d’activité et les rapports
d’extrant. Alors, quand vient le moment d’écrire mon texte pour la Voix de
l’Est, curieusement, la seule idée qui me vient en tête c’et en rapport avec
les rapports.
J’ai écrit des rapports toute ma
vie. Des petits ou des gros, des insignifiants, aussitôt avalés par la machine
à procédure et disparus dans des entrailles inexplorables, et des plus
importants, parfois pour la bouche délicate d’une commission parlementaire ou
pour le palais délicat d’un groupe de hauts fonctionnaires. Certains ont même
leur numéro d’ISBN, sont donc officiellement édités, et devraient se retrouver
dans le fond de la bibliothèque nationale où ils vivent leur vie étriquée de
rapport conséquents mais oubliés.
Toutefois, c’est dans les projets
internationaux que j’atteins des sommets. Ici le rapport est à ce point
essentiel que leur écriture porte un nom; le rapporting. Quand vous examinez
les Termes de Références d’un projet (l’une des expressions sacro-saintes de
l’international), quand vous lisez un affichage de poste, vous verrez chaque
fois, pour le chef de projet, des activités de rapporting. Et, en effet, on rapporte!
Soixante ans que des intervenants
de tous les pays riches écrivent des rapports sur leurs activités d’appuis à
des pays pauvres. En empilant ces rapports les uns sur les autres on est
certainement capable de grimper jusqu’à la lune. Et en alignant toutes leurs
mots en une seule longue ligne on fait probablement tout le tracé de l’orbite
terrestre autour du soleil. Cela n’a, malheureusement, pas changé grand-chose.
Je n’ai pas trop à me plaindre,
cette fois, le bailleur européen qui finance le projet demande bien moins de
rapports, et moins d’ajustements à ceux-ci, que ne le faisait l’ACDI quand j’étais
en Haïti, surtout après le tremblement de terre. Et ce n’est pas tant le fait
d’écrire des rapports qui me dérange, au contraire j’aime plutôt cela. Non, ce
qui me perturbe c’est qu’on en en fasse si peu compte. Une fois le rapport
écrit, une fois le rapport reçu, il ne semble y avoir aucune suite. Le rapport
n’est vu que comme un moyen de rendre compte de manière statique, que comme une
preuve justifiant des dépenses et des actions. Alors que les rapports ne
prennent leur sens et leur valeur que quand ils sont accessibles, quand ils
sont lus, et quand on se base sur eux pour faire autre choses, la fois
suivante.
Et si on en lisait quelques-uns,
de ces fameux rapports?
mardi 16 juin 2015
Les saisons
Le temps change. Les journées
raccourcissent un peu, de manière si peu sensible qu’il est impossible de le
percevoir sans montre. Même au cœur de l’hiver, quand on est en fait à quelques
centaines de kilomètres à peine au sud de l’équateur, les saisons ne se
démarquent pas par la longueur des jours. Pour ce qui est de la végétation, le
changement n’est pas évident non plus. Ici, nulle période où tous les arbres changent
de couleur, nul moment où toutes les feuilles ont disparus. Je ne retrouve pas,
autour de moi, ce changement graduel qui nous fait passer du vert acidulé et un
peu jaune des bourgeons à peine ouverts au vert profond et riche des feuilles
matures qui s’étalent avant de se barbouiller de rouge, d’ocre et de jaune
flamboyant. Et, bien sûr, ni mois couverts de blanc, ni saison des récoltes,
chaque fruit, chaque légume, chaque céréale ayant son propre cycle, plusieurs
fois dans l’année.
Pourtant le temps change. Voilà
des mois que, jour après jour, la température avoisine les trente-cinq, sans
parler de l’humidité. Le matin, mon épouse regarde dehors et s’exclame «Zut, il
fait soleil». Comme hier, comme demain. À partir de onze heures le soleil s’affirme
et l’ombre est à peu près inexistante, même près des édifices élevés; il faut
être directement sous un arbre, sous un toit, pour bénéficier d’un répit. Même
là, il n’y a par un souffle de vent. L’air est lourd, presque visqueux. Le
linge nous colle au corps et nous en changeons, au retour à la maison, après
avoir pris une douche. En dehors de brusque tempête de vent, sans une goutte de
pluie, et en dehors de brusques et violentes pluies, sans une brise, le temps
se répète et le soleil semble crucifier un ciel trop bleu, sans un nuage. Puis
voilà, depuis une semaine, que le ciel est couvert d’une brume impalpable, que
le soleil est caché, que les soirées sont plus fraiches, aux environs de vingt-cinq.
Car le temps change. La saison
sèche commence, la saison des pluies est finie. Nous ne verrons plus le soleil
pendant des mois, nous fermerons la clim et ouvrirons les fenêtres. Le sable et
la poussière vont voltiger partout, s’infiltrer sans répit. Les odeurs vont
persister, aucune ondée ne venant laver les relents d’urine le long des murs.
Alors le temps change. Mais bien peu
à l’équateur. Nous, nous partons. Ou
plutôt nous revenons. Encore un mois et nous retrouverons les saisons, celles
qui font que chaque jour est un peu imprévisible. Et nous recommencerons à
écouter la météo.
Mais, partout, que les temps
changent peu. Les mêmes politiques qui se discutent, les mêmes projets
qui s’affrontent, les mêmes sottises à la base des mêmes tensions, les mêmes
germes de guerres, les mêmes noms qui n’en finissent plus de tourner. Il serait
grand temps de passer à une autre saison.
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