lundi 11 mai 2009

L’état existe-t-il pour les citoyens ou les citoyens existent-ils pour l’état ?

Un jour, il y a très longtemps, des gens ont décidé de se regrouper et de partager un certain nombre de tâches entre eux. Au-delà de la famille, au-delà même du clan puis de la tribu, les humains se sont organisés en groupes de plus en plus larges pour partager des tâches de plus en plus complexes. Plusieurs de ces groupes ne bénéficiaient qu’à quelques personnes, des personnes qui s’accaparaient du pouvoir et de la richesse en échange de leur protection. Puis nous avons inventé la démocratie, pour ne plus être les esclaves de l’état mais pour que l’état nous serve. Mais dans tous les cas, sous la tyrannie comme sous la démocratie, les citoyens sont liés à l’État.
Voilà ce que c’est que d’être citoyen. Avoir une citoyenneté c’est détenir un lien avec un état, lien qui nous oblige à certaines choses et qui, en retour, oblige aussi l’état à d’autres choses : et la toute première de ces obligations de l’état envers ses citoyens c’est de respecter la citoyenneté qu’il a lui-même reconnue.
La citoyenneté ne me soustrait pas à la loi, ne me soustrait pas à la prison, ne me soustrait pas à mes devoirs envers ma société, bien au contraire ; mais elle me soustrait, dans la mesure du possible, au pouvoir des autres états ou des autres groupes humains. Que mon état ne soit pas en mesure de m’aider si je suis enlevé ou menacé dans un autre pays, que mon état ne puisse pas me secourir si je suis arrêté arbitrairement sur un autre continent, est une chose regrettable mais possible.
Mais quand mon état refuse de me secourir, quand mon état ne veut pas respecter ses obligations envers ses citoyens, nous sommes devant une situation grave. Sous le gouvernement Harper le Canada a renié plusieurs fois, et de manière totalement immorale, ses citoyens. Au cours de la guerre du Liban, le premier ministre s’est interrogé à savoir s’il devait secourir des canadiens qui avaient la double nationalité, s’arrogeant le droit de revoir à lui seul les fondements de notre citoyenneté ; et les canadiens pris dans cette guerre ont été les derniers occidentaux à être secourus, bien après les français, les américains, les suédois. Le même premier ministre a refusé de faire rapatrier un canadien condamné à mort afin qu’il purge ici sa peine de prison à perpétuité, ce que tous les gouvernements canadiens ont pourtant fait depuis l’abolition de la peine de mort.
Actuellement le gouvernement canadien renie deux de nos concitoyens, l’un au Soudan et l’autre à Guantánamo. Dans les deux cas nos obligations internationales sont claires, dans les deux cas le devoir de l’état est évident. Dans un cas, même, les tribunaux ont ordonné au gouvernement Harper de rapatrier son citoyen. Mais Harper persiste et signe ; pour lui il y a des citoyens de seconde zone, des citoyens qui n’en sont pas. Le problème est qu’il décide seul de qui est citoyen, méprisant nos lois et nos tribunaux, méprisant ce qui est le fondement et le ciment d’une société ; le lien d’obligations réciproques entre le citoyen et l’état.
Ce sont là des actions indignes d’un état évolué et qui montrent que Harper n’a jamais eu l’étoffe d’un chef d’état, seulement celle d’un chef de parti. Il est plus que temps qu’il soit limité à ce dernier rôle, si même les conservateurs veulent encore de lui.