mardi 25 février 2014

L'humour c'est sérieux

Dimanche soir, à Tout le monde en parle, Justin Trudeau a fait une blague en traitant de l'Ukraine. Depuis des politiciens conservateurs, le chef du NPD et l'ambassadeur du gouvernement dictatorial et déchu d'Ukraine au Canada lui ont demandé de s'excuser. Or la blague était bonne, elle démontrait en plus une très bonne connaissance de la situation et, surtout, elle était dans la grande tradition de l'humour utile. D'abord, la blague elle-même, qui associe la mauvaise humeur probable de Poutine, et donc les risques qu'il intervienne en Ukraine, à la défaite des russes au hockey; elle est bonne, d'autant plus qu'elle correspond à une réalité à peu près certaine. Ensuite, la connaissance de la situation, qui établit un lien entre la mauvaise humeur d'un seul homme, Poutine, et le risque d'une intervention violente dans un pays voisin; elle montre que Justin Trudeau connait évidemment la situation de l'Ukraine mais, aussi, la situation de la Russie qui est aujourd'hui une dictature à peine déguisée où les opposants sont brutalement arrêtés et condamnés, où les élections sont truquées, où la constitution est contournée pour laisser le dictateur au pouvoir et où, finalement, les mouvements d'humeur du dictateur Poutine peuvent mobiliser la puissance militaire et économique du pays. Pour terminer, il y a la tradition de l'humour utile qui veut que l'humour est une arme, pas seulement un joujou; il sert à dénoncer les dictateurs, les injustices, les horreurs et non pas seulement à divertir le public en faisant le clown. D'Yvon Deschamps dénonçant le sexisme aux Cyniques attaquant l'impérialisme américains en passant pas RBO critiquant la pauvreté des annonces télévisées, l'humour est meilleur quand il est utile. Voltaire l'a utilisé puissamment pour combattre autant le massacre des indiens d'Amérique que les guerres européennes. L'exemple vient donc de loin, et de haut. Quant à moi, je persiste à penser qu'il n'est pas indispensable de parler des choses sérieuses sur un ton sérieux. Que Trudeau utilise une plaisanterie pour illustrer le danger qui menace l'Ukraine est parfaitement dans la tradition de l'humour utile, d'autant qu'il participait alors à une émission de variété et non pas à un forum politique. Ce sont ceux qui le critiquent qui montrent leur immaturité, leur fermeture d'esprit et la pauvreté de leur intelligence. Il faut même leur expliquer une blague!

jeudi 20 février 2014

La démocratie attaquée par les conservateurs

Que les conservateurs se livrent à de la publicité négative, nous y sommes désormais habitués. Ils s'amusent ces jours-ci à distribuer du papier à rouler à l'effigie de Justin Trudeau pour tenter de se moquer de sa position, qui est celle de la grande majorité des canadiens, sur la marijuana; prenez le papier et donnez le à quelqu'un qui l'utilisera, pour une fois la propagande conservatrice servira à quelque chose! Ce ne sont là, après tout, que des manœuvres puériles, irresponsables et sottes. Mais, il y a plus grave. Les conservateurs s'attaquent au rôle du Directeur général des élections et cela afin de réduire l'accès au vote du plus grand nombre possible de canadien. D'abord, ils veulent retirer au DGE le droit de faire enquête; ce droit retiré, qui pourra encore dénoncer les appels frauduleux qui ont, en 2011, indiqués de faux bureaux de votations à des milliers d'électeurs? Qui protégera en fait les électeurs contre le vol de leur droit le plus essentiel en démocratie? Pire, les conservateurs veulent aussi retirer au DGE le droit de promouvoir le vote; alors que les canadiens sont déjà trop nombreux à ne pas utiliser leur droit de vote, alors qu'il y a un devoir d'éducation civique pour amener le maximum de gens à voter, les conservateurs souhaitent voir ce droit exercer par le moins de canadiens possible. Réduire le droit de vote, critiquer les tribunaux qui ont osé s'opposer à plusieurs de leurs tentatives anticonstitutionnelles, voilà à quoi en sont rendus les conservateurs pour s'attacher au pouvoir. Il est grand temps de faire le ménage.

jeudi 13 février 2014

Les réglements

Hier je suis allé suivre une formation sur l'utilisation des pesticides (herbicides, insecticides essentiellement). Comme agriculteur et producteur d'arbres de Noël j'ai en effet besoin de contrôler les mauvaises herbes pour favoriser la croissance de mes arbres. La lutte mécanique (fauchage, labourage) et culturale (plantation d'herbes moins envahissantes entre les rangées d'arbres) ne suffisant pas, je dois recourir à des herbicides deux ou trois fois par année. Tout cela pour dire que, pour acheter des pesticides pour usage agricole je dois avoir un certificat, que pour avoir ce certificat je dois réussir un examen et que pour réussir cet examen je dois suivre une formation. Voilà qui est excellent, me direz-vous et qui vise à protéger à la fois l'environnement et les personnes. Je suis d'accord avec vous. Le fait que je dois payer pour le cours, payer à nouveau pour l'examen, payer encore pour le certificat et payer par la suite pour le renouvellement du certificat n'est qu'une conséquence nécessaire de notre volonté de protection. Ce cout, d'environ 500$ sans compter mon temps et mes frais de déplacement, je vais par contre, bien sur, vous le refiler quand je vais vous vendre des arbres de noël. Comme mon voisin quand il vend son soja. D'ailleurs lui, comme moi, tient compte dans ses couts de la diminution de la surface de ses terres utilisables puisque nous devons maintenant, par règlement, conserver une bande riveraine à chaque cours d'eau et fossé. Mais nous sommes d'accord, comme vous, pour investir dans la protection de notre environnement. Par ailleurs j'achète une automobile qui doit, par règlement, avoir un système antipollution et pouvoir résister à un impact de 5km/h sans aucun dommage. Le constructeur me la vend plus cher puisqu'il doit absorber ces frais. Avec mon auto je dépose ma fille au cégep, où toutes les portes, par règlement, doivent être en acier afin de résister pendant 2 ou 3 heures à un incendie. Ces portes coutent plus cher et les travaux fait au cégep, comme dans tous autres édifices public, coutent plus cher et nous payons plus d'impôt et de taxes pour couvrir ces dépenses plus élevées. En fait, que je considère ma salle de bain (règlement sur les eaux usées, les égouts, les fosses septiques), ma cuisine (inspection des aliments, sécurité des appareils ménagers), mon terrain (utilisation des pesticides, de l'eau), le ciel au-dessus de ma tête (sécurité aérienne, usage des ondes), bref, que je regarde où que ce soit, il y a toujours des règlements et chacun d'eux est plein de bons sens, pleinement justifié et demande à être appliqué. Mais chacun d'eux impose des couts, pour ceux qui doivent le respecter et pour ceux qui doivent le faire respecter. Et tous ces couts c'est nous qui les payons, au bout du compte. Il faut simplement en être conscient, surtout quand on s'interroge sur ce qui est important pour nous, comme société. Nous n'arrivons plus à nous payer tout ce que nous voulons nous payer mais, en même temps, nous ne comptabilisons pas du tout le prix des règlements que nous adoptons les uns après les autres. Il faudrait peut-être, aussi, se demander ce qui est le plus important, bref faire des choix. Depuis les détecteurs de fumée jusqu'au signaux stop sur les autobus scolaires, depuis l'inspection des ascenseurs jusqu'à celle des jouets importés, depuis la lutte au beurre d'arachide jusqu'à celle des moisissures dans nos écoles, depuis le contrôle des champs d'épandage jusqu'à celui des huiles usées, nous voulons réduire tous les risques, règlementer tous les aspects de la vie. Et quand un accident arrive, nous faisons enquête pour voir à ce qu'il ne puisse pas se reproduire en mettant en place de nouveaux règlements. Tout cela est plein de bon sens, tout cela est souhaitable. Et tout cela suppose des dépenses de plus. Jusqu'où irons nous ainsi?

lundi 10 février 2014

Un peu de lecture

Ces jours-ci je relie la longue série Fortune de France de Robert Merle, série qui traite de manière romancée de la période des guerres de religion, en France, au XVI siècle. La France, comme toute l'Europe d'ailleurs à cette époque, s'est déchirée dans une lutte fratricide entre catholiques et protestants. Tous croyaient au même dieu, tous partageaient une même prière, le notre-père, et ils ont pourtant réussi à s'entretuer, à faire les uns au dépends des autres de vastes massacres de milliers de personnes, femmes et enfants compris. Sans compter les buchers et les tortures. Par la suite les protestants ont du fuir la France qui s'est ainsi appauvrie, perdant de nombreux citoyens compétents qui ont apportés leurs savoirs et leurs techniques en Flandre, en Angleterre, dans les états allemands. La chose n'était pas nouvelle, les juifs ayant du quitter l'Espagne une centaine d'années plus tôt, enrichissant le Maroc et l’Occitanie de leur connaissances médicales et scientifiques et laissant l'Espagne à sa religiosité et à ses superstitions. Et la chose n'était pas exclusive au continent européen, ce qui allait devenir les États-Unis d'Amérique étant fondé par une poignée de pèlerins fuyant à bord du Mayfloyer la répression religieuse anglaise; on est en 1620, au moment où les guerres de religion se sont apaisées en France et où l'Angleterre est pourtant terre d’accueil pour les protestants pourchassés. Chez nous, en Nouvelle-France, nous étions en guerre continuelle avec les protestants du sud, anglais d'abord, américains ensuite. Puis nous avons du apprendre à cohabiter, même si nos villages étaient le plus souvent séparés, comme nos écoles. Nous ne nous divisions pas alors selon la langue mais bien selon la religion, catholiques d'un côté et protestants ou anglicans de l'autre. C'est ainsi que bien des irlandais catholiques sont devenus francophones, car inscrits à l'école catholique, alors que les grecs orthodoxes ou les juifs sont devenus anglophones puisque nous les refusions dans les écoles catholiques alors qu'ils étaient acceptés dans les écoles protestantes. Bref,bien avant de nous définir par la langue nous nous définissions par la religion, arrivant même à nous battre avec ceux et celles qui priaient comme nous le même dieu. Et c'est de cela qu'il me semble que nous devrions nous souvenir; d'abord que la religion est, pour une majorité d'humains encore aujourd'hui, un élément essentiel de leur identité et, ensuite, que seule la tolérance envers les différences est possible quand on veut construire une société juste et prospère. Quand on se ferme à la différence le premier que l'on appauvrit, c'est soi-même.

jeudi 6 février 2014

Mon père

Mon père était un homme à la fois très instruit et croyant. Entre ses recherches et ses enseignements en biologie, d'une part, et sa pratique religieuse, d'autre part, il ne voyait pas de contradiction; il s'agissait de deux univers parallèles, de deux réalités d'ordre différent qui n'avaient pas à s'entremêler. C'était aussi un homme bon et pourtant totalement distrait, presque absent. De tout cela il résultait qu'en matière de politique il était très discret sur ses opinions et très tolérant à celles des autres. Et il me semble que cette modération manque aujourd'hui dans la vie politique et explique en partie le cynisme des électeurs. Chacun sait, en effet, que tout n'est pas noir ou blanc et qu'il est rare que mon adversaire ait totalement tort. Or, le jeu partisan voudrait réduire ceux d'en face à une position unique, opposée en tout à la nôtre, et ne comportant aucun aspect valable. Cette simplification de la réalité, ce désir de se démarquer, vont à l'encontre du sens de la nuance qui caractérise bien de mes concitoyens, comme mon père. Pour gagner et garder le respect des électeurs il faut à la fois être capable de modération et de passion, de retenue et de volonté de changement. Vous me direz que c'est impossible, qu'on ne peut concilier de telles qualités. Je vous répondrai que mon père les a conciliées pendant quatre-vingt treize ans.